Plusieurs espèces animales dépendent d’un équilibre particulier afin de survivre. C’est le cas de l’ours polaire qui, au Manitoba, a vu son territoire diminuer, notamment dû aux activités minières et hydrauliques. Mira Oberman, directrice des communications et des programmes publics pour la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP), revient sur les solutions à mettre en place afin d’empêcher ce désastre écologique.

Par Gautier CALON – Collaboration spéciale

Créée en 1963, la SNAP s’est développée au fil des années avec comme but principal de défendre les parcs naturels dans tout le Canada. L’organisme s’est ensuite étendu sur toutes les provinces, la section du Manitoba fut quant à elle créée en 1970. Aujourd’hui, le Nord du Manitoba accueille une sous-espèce d’ours polaires bien particulière. « Il faut savoir que les ours polaires du Manitoba sont vraiment uniques. Tandis que les autres creusent leurs tanières dans la neige, les ours polaires du Manitoba creusent leur tanière directement dans la terre, car la neige arrive trop tard. Ils les construisent généralement sur des collines, près des rivières et des arbres, afin d’avoir une tanière bien stable », explique Mira Oberman.

| Une espèce menacée

Afin de limiter au maximum la réduction du territoire des ours polaires, des mesures ont été mises en place. « Le Manitoba protège 11 % de la province. Le gouvernement canadien a annoncé vouloir protéger 30 % du territoire d’ici 2030. Pour que nous ayons un écosystème durable, il faudrait protéger 50 % des espaces du Canada. »

Ces territoires protégés jouent un rôle majeur pour la période d’hibernation et de mise bas des ours polaires selon Mira Oberman « C’est pour ça qu’il est très important de protéger ces zones où elles construiront leurs tanières, pour qu’elles puissent tranquillement accumuler du gras afin de se préparer à la période de jeûne. Car si elles perdent du temps à trouver et à créer une tanière plus loin, elles auront donc moins d’énergie pour protéger leurs petits »

Mais l’activité industrielle n’est pas le seul danger pour les ours polaires. En effet, le réchauffement climatique accélère la fonte des glaces, territoire de chasse pour les ours polaires. Mira Oberman : « Les ours polaires passent en moyenne 30 jours de plus sur les littoraux qu’il y a 30 ans, la période de dégel de l’eau étant passé de 102 à 166 jours à cause de la fonte. Ce qui veut dire qu’ils passent 30 jours de moins à chasser. »

| Une population qui diminue

La chasse permet aux ours polaires de se créer une réserve de gras très importante. Selon une étude du 30 décembre 2020 de l’Académie d’Oxford, le pourcentage de graisse chez les ours polaires du Manitoba a chuté de 56 % en 40 ans, passant d’un stockage d’énergie d’environ 3 500 000 Mégajoules à moins de 1 500 000 Mégajoules.

Cette graisse que les ours polaires vont accumuler va leur permettre de survivre durant une longue période sans se nourrir. « Ce qui est fascinant avec les ours polaires, c’est que les femelles peuvent passer plus de 180 jours sans manger. Les mères passent une partie de l’automne à construire la tanière, puis donnent naissance vers fin novembre, pour ensuite nourrir et protéger les petits pendant quatre mois. »

Aujourd’hui, la population d’ours polaires a diminué au Manitoba, affirme Mira Oberman : « En 1990, il y avait une population d’environ 1 200 ours polaires dans le Manitoba, aujourd’hui, ils sont environ 618, ce qui correspond à une baisse de 50 % sur 30 ans. »

ours polaires
Selon une étude, le pourcentage de graisse chez les ours polaires du Manitoba a chuté de 56 % en 40 ans. (photo : Gracieuseté Jean-Pierre Parenty)

| Une préservation avantageuse

La protection des zones de vie et de chasse des ours polaires ne présente pas seulement un avantage pour la survie de ces derniers.

En effet, le Manitoba abrite d’importantes réserves énergétiques. « Il ne faut pas oublier que le Nord du Manitoba constitue un gigantesque puits de carbone, donc ça nous pousse encore plus à protéger ces zones. Ces réserves con-tiennent presque 30 ans de production de carbone. Imaginez la catastrophe si ce puits venait à être exploité! ».

Pour Mira Oberman, la création de ces zones apporte plus d’avantages que d’inconvénients. « La protection des ours polaires, en plus d’être positive pour l’environnement apporte aussi une grande quantité de touristes qui viennent les voir dans leur habitat naturel chaque année près de Churchill. On peut même mettre en place une économie durable et respectueuse de l’environnement grâce à ça. »

Ces opérations de protection ont aussi un coût peu élevé selon Mira Oberman : « Ce qui compte pour protéger les habitats de ces espèces, c’est de mettre en place des législations, qui créent des espaces protégés. Le seul coût est le temps du gouvernement, parce que ce n’est pas comme si on avait besoin de beaucoup d’infrastructures qui coûtent des millions ».

Malgré la complexité de la mise en place de ces projets, Mira Oberman garde espoir. « Je continue de croire que l’humanité a la capacité de réduire le changement climatique, et de protéger la nature de cette extinction de masse qui se profile. Le mieux que l’on puisse faire aujourd’hui à notre échelle est de protéger les animaux et leur descendance »

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