Depuis ces révélations, une enquête a été ouverte par le Commissaire aux langues officielles et le ministère assure travailler à réduire cet écart.
C’est un papier de Radio-Canada Ottawa qui a révélé que les délais de traitement étaient inégaux. En effet, en 2019-2020, les vétérans francophones attendaient en moyenne 15,8 semaines de plus que leurs homologues anglophones. De quoi ouvrir une enquête auprès du Commissariat aux langues officielles.
Étant donné qu’une enquête est en cours au sujet de cette question, Raymond Théberge, commissaire aux langues officielles du Canada n’a pas souhaité accorder une entrevue à La Liberté. Il a, cependant, fait la déclaration suivante par voie de courriel. « J’ai été particulièrement touché par la nature de ces plaintes, comme il s’agit de services offerts à des personnes qui ont servi notre pays et qui ont besoin de soutien.
Rapport d’enquête
« Un rapport d’enquête a été envoyé en juillet 2021 et le suivi devrait commencer sous peu. À noter que ce rapport d’enquête regroupe six plaintes reçues depuis 2017-2018.
« De manière générale et tel que le prévoit la partie IV de la Loi sur les langues officielles, il incombe aux institutions fédérales, comme Anciens combattants, de veiller à ce que le public puisse communiquer avec leur siège social ou leur administration centrale, et en recevoir les services, dans l’une ou l’autre des langues officielles.
« Pour l’ensemble des services offerts par les institutions fédérales, les délais d’attente devraient être les mêmes pour les francophones et les anglophones. »
En 2021, il y avait un arriéré de 23 000 dossiers dont 5 000 concernés des francophones. Darrell Samson, secrétaire parlementaire du ministre des Anciens Combattants et ministre associé de la Défense nationale, voit deux raisons principales qui peuvent expliquer des délais de traitement plus long autant pour les anglophones et les francophones.
« Premièrement, lorsque le Parti libéral a formé son gouvernement après les élections de 2015, il y a eu des consultations avec des vétérans. Très vite, on s’est aperçu que nous avions un devoir d’offrir davantage des services pour mieux desservir les femmes et les hommes qui se sont battus et qui ont sacrifié beaucoup pour notre pays.
« Le gouvernement fédéral a alors ajouté une série de programmes qui viendraient les appuyer.
« Deuxièmement, il faut reconnaître, qu’entre les années 2012 et 2015, le Parti conservateur a fait d’énorme coupures. Ils ont fermé neuf bureaux partout au pays qui desservaient directement les vétérans. La fermeture de ces bureaux a entraîné un congédiement de plus de 1 000 personnes. »
S’assurer d’être prêts
Actuellement, le ministère Anciens Combattants du Canada possède 38 bureaux et trois cliniques mobiles dans le Nord. Aucun des deux bureaux au Manitoba n’offre des services en français.
La cause probable qui peut expliquer un écart entre les délais tient à la capacité bilingue du ministère Anciens Combattants. « Avec le manque de personnel, il nous fallait embaucher du monde et les former. Il y a eu un investissement de 340 millions $ supplémentaire pour le personnel. Aujourd’hui, sur 350 employés, 108 sont bilingues francophones. Soit 30 % de notre masse salariale alors que les demandes des vétérans francophones ne représentent que 15 %. »
Pourtant pour Daniel Boucher, directeur général de la Société de la francophonie manitobaine, la masse salariale bilingue ne devrait pas être une excuse. « Encore une fois, il y a un manque de planification. C’est le résultat d’un manque de flexibilité, d’une structure qui ne trouve pas de moyens de s’adapter. C’est très frustrant.
« C’est une culture organisationnelle où il y a un manquement de savoir-faire sur la question de l’équité et le service à la clientèle.
« J’entends les coupures. Mais quand on met en place un nouveau programme, il faut être prêts. Il faut s’assurer que les anglophones et les francophones reçoivent un service égal. C’est encore les francophones qui doivent attendre. Il faut planifier et délivrer seulement le service quand il est prêt. Il n’y a pas de raison de ne pas le faire comme ça. »
En février 2023, l’écart entre les délais des vétérans francophones et anglophones était de 2,4 semaines. L’arriéré de dossier était de 7 800 dont 1 000 francophones.
Darrell Samson assure que le ministère travaille pour que « cette année, nous nous attendons à ce qu’il n’y ait plus d’écart, ni d’arriéré. Nous sommes confiants qu’avec cette nouvelle stratégie, nous allons pouvoir mieux répondre aux besoins. »
D’ailleurs Darrell Samson, d’origine acadienne, reconnaît que le personnel bilingue ne devrait pas être un problème à l’avenir. « Il n’y a pas d’excuse pour ne pas trouver des personnes bilingues au pays. Aujourd’hui, il y a des réseaux d’écoles françaises partout au pays. Il y a plus de 150 000 élèves dans des écoles de langue française langue première. Plus l’augmentation de la fréquentation des écoles d’immersion, il n’y a vraiment pas d’excuse pour dire qu’on ne peut pas trouver d’employés bilingues. »