Une collecte de fonds se tiendra le 11 février au Musée de Saint-Boniface. L’objectif : récolter suffisamment de fonds pour reconstruire le camp Morning Star. Ce dernier, avait été érigé en réponse à l’annonce d’un projet d’exploitation minière sur Black Island situé au milieu du Lac Winnipeg.
Le camp Morning Star aurait fêté ses quatre ans ce 16 février, s’il n’avait pas été réduit en cendre par un incendie. En effet, en 2019, l’entreprise Canada Premium Sand (CPS) se voit attribuer, par la Province, l’autorisation de lancer une exploitation minière de sable de silice sur Black Island, territoire visé par le Traité n˚5. En février de la même année, les machines commencent à s’installer sur ce qui deviendra bientôt un site industriel. La réponse ne se fait pas attendre.
Des silhouettes s’agitent dans la nuit, sur un chemin de terre, à l’ombre des arbres, à quelques mètres des rives du lac Winnipeg, un tipi est érigé et un feu sacré est allumé. Symbole de résistance et d’espoir, le camp Morning Star est né.
Pour établir une entreprise de production de sable de silice, comme pour n’importe quel projet industriel de ce calibre-là, des études doivent être menées au préalable. Sur la nature du projet, mais aussi les potentiels impacts écologiques qu’il peut avoir.
Le projet, initialement approuvé par la Province, prévoyait une durée d’exploitation de 54 ans, à raison de 1,2 million de tonnes de sable siliceux extrait chaque année, a finalement été modifié en 2022. Il doit donc de nouveau se soumettre à une étude de la part de la Province. Une aubaine pour les résidents du Camp Morning Star, fermement opposés au programme.
Dans cette nouvelle formule, CPS a revu ses ambitions à la baisse et revêt désormais un manteau de conscience écologique. D’après le site internet officiel de la compagnie, le sable récolté servira exclusivement à la fabrication, au Canada, de panneaux solaires. Mise en avant dans la nouvelle description du projet, la phrase suivante : « Moins de sable extrait, moins de trafic et une empreinte environnementale réduite. »
Terres autochtones
Dans le cadre d’une consultation publique vis-à- vis de la future mine, Dennis M. LeNeveu, consultant environnemental, pointe du doigt une multitude de problématiques que l’entreprise canadienne ne mentionne pas. À savoir les effets « négatifs » sur l’environnement et leurs répercussions sur les communautés autochtones environnantes. Les aspects principaux soulevés par l’expert concernent la pollution des eaux du Lac et de la faune sous-marine, impactant par extension la pêche et la chasse. Mais surtout, la nature même des travaux, pourrait entraîner une exposition prolongée à la poussière de silice, pouvant être responsable de troubles respiratoires et même de cancers pulmonaires.
Pour M.J McCarron, membre du camp Morning Star, ce n’est qu’une partie des problèmes.
« Cette terre est le reflet de notre culture. Ce territoire est un territoire de piégeage, c’est un lieu d’apprentissage pour les jeunes. Perdre ce lieu, c’est perdre une partie de notre identité. »
C’est dans ce contexte que la mobilisation autour du camp s’est faite. Pour autant, les membres ne se revendiquent pas du tout comme étant protestataires. Dès le départ, le camp avait une vocation à éduquer le public sur les risques qui accompagnent ce projet d’extraction. « Le camp a été mis en place pour informer les gens sur ce qu’il se passe, pour qu’ils comprennent nos inquiétudes », explique M.J McCarron.
Perspectives et éducation autochtones
Depuis la mise en place du tipi, plusieurs groupes scolaires ont eu l’occasion de se rendre sur place pour en apprendre plus, à la fois sur le projet de mine, mais aussi sur l’histoire et les traditions ancrées sur ces terres. « On leur apprend à couper du bois, nous faisons des activités manuelles sur la terre en racontant des histoires traditionnelles. Il y a une grande demande et je pense que le contexte actuel autour de la réconciliation explique en partie cette popularité. »
Au cours de ces quatre années, le camp s’est quasiment transformé en un petit village. Reginald Simard participe à la vie sur le site, il raconte : « On a continué d’améliorer le camp avec le temps. Les premières années, nous avions des gens sur place 24 h sur 24. Mais lorsque CPS s’est retiré, on a un peu baissé notre garde. »
Une baisse de garde, non sans conséquences. En effet, depuis sa création, le camp a brûlé deux fois dans des circonstances que les informations en notre possession ne nous permettent pas de définir clairement.
Pour cette raison, un souper de levée de fonds se tiendra au Musée de Saint-Boniface le 11 février de 16 h à 20 h 30. L’objectif étant de racheter ce qui a été perdu et d’investir davantage dans les programmes d’éducation proposés. Car, comme le confirme Reginald Simard :
« Le camp représente toujours un lieu d’éducation. Mais pour nous c’était aussi un lieu pour nos cérémonies sacrées, parfois on s’y retrouvait seulement pour faire de grands repas. »
Au moment de notre entretien avec Reginald Simard, tous les billets pour la levée de fond avaient été vendus. « Un bon signe » pour le résident de Manigotagan qui ajoute : « Ça nous conforte dans l’idée qu’après quatre ans, nous faisons toujours la bonne chose. »
70 personnes sont attendues à l’évènement. Les organisateurs espèrent parvenir à récolter entre 6 000 $ et 12 000 $ (1).